Je suis Malien vivant au Mali et je suis membre de la société civile. A ces titres, il me plait de partager ici mes idées par rapport aux enjeux vitaux du pays parmi lesquels, le choix en 2022, du futur ou de la futur(e) Président(e) post-transition.
Quels critères cardinaux me suis-je établis pour ce choix crucial à venir, en complément des critères constitutionnels et légaux ? Voici ce que je suggère comme réponse et comme contribution en la détermination de tels critères par la société civile, qui pourront aider à choisir le ou la meilleur(e) des candidats.
Critères de sélection
Mon ou ma futur(e) candidat(e) sera celui ou celle qui parle couramment deux de nos langues nationales en plus d’une langue internationale. C’est celui ou celle avec lequel ou laquelle, je peux parler de mes problèmes de survie d’abord et d’avenir ensuite sans passer obligatoirement par une langue étrangère. Je serais fier de mon ou de ma futur(e) Président(e) s’il ou elle connaissait bien l’histoire de son terroir d’origine et s’il ou elle se donnait quelques fois, le temps de la raconter, en sa langue maternelle, de préférence.
Oui, je veux un ou une futur(e) Président(e) plus proche de la vie réelle de ses compatriotes, car un(e) Président(e) proche et attentif (ve) aux besoins et priorités de ses administrés, doit connaitre le prix du kilo de viande, celui du riz ; les frais de scolarité, selon les niveaux et ordres d’enseignement ; les difficultés des élèves et des étudiants pour apprendre ; les difficultés des paysans, des pêcheurs, des éleveurs, des ouvriers, des commerçants, des fonctionnaires, des chefs d’entreprise, des diplômés sans emploi, des retraités, des personnes en situation de handicap ; les problèmes liés aux changements climatiques et à la désertification galopants, etc. S’il ou elle n’a pas la maitrise des informations sur ces acteurs économiques et sur l’évolution de certains phénomènes planétaires, il ou elle ne pourra pas les conduire aux changements ou aux transformations de leurs conditions de vie et de travail qualitativement meilleures.
Privilégier l’intérêt commun
Mon ou ma futur(e) candidat(e) présidentiable sera celui ou celle qui connait les problèmes généraux communs aux Maliens ainsi que les difficultés spécifiques à chaque région du Mali, secteur d’activité par secteur d’activité. Il est maintenant établi qu’en matière d’information, les visites ou tournées des ministres ou des Gouverneurs et les rapports y relatifs ne suffisent plus pour connaitre vraiment les réalités du terrain et les dynamiques d’enjeux inter et intracommunautaires. Afin de s’informer à la source, mon ou ma candidat(e) à la présidentielle doit aller au contact des réalités du terrain, car être mon ou ma futur(e) présidentiable, c’est accepter d’abord d’aller à l’écoute des populations et ensuite d’œuvrer en cas de victoire, pour la satisfaction de leurs besoins fondamentaux : sécurité(s), éducation, santé, logement, alimentation, transport et télécommunications, etc.
Tous les candidats crédibles qui ont fait cela honnêtement et patriotiquement sont devenus des présidents inoubliables pour leurs compatriotes. Étaient-ils politiquement et socialement plus intelligents que leurs concurrents qui l’ont superficiellement fait ou pas du tout ? Étaient-ils plus empathiques à l’égard des Maliennes et des Maliens ? Étaient-ils plus visionnaires qu’eux ? Étaient-ils plus libres et plus souverains dans leurs décisions politiques ? Étaient-ils plus pénétrés de leurs lourdes et nobles responsabilités nationales ? S’ils étaient tout cela en même temps (c’est ce que j’ai personnellement fini par admettre) et qu’ils ont été reconnus pour avoir fait des réalisations mémorables pour le bien-être des populations, sans calcul politicien, mais avec réalisme et pragmatisme, pourquoi serait-il moins glorieux pour les futurs candidats à l’élection présidentielle de faire comme eux, en cas de victoire ?
Même si les temps ont changé, l’intérêt commun, surtout national quant à lui, demeure identifiable et diagnosticable par tous et en tout temps. Enfin, étaient-ils pour autant parfaits et irréprochables ? Certainement pas, mais malgré des insuffisances, qui existent en chaque être humain, ils nous ont rendus fiers d’être Maliens et très fiers de ce qu’ils nous ont laissé comme principes de gouvernance : réfléchir, consulter, décider et agir toujours majoritairement en fonction de l’intérêt commun et en fonction des sacrifices à consentir ensemble pour la grandeur et le développement du Mali.
« Mali Koura Gnè Ta Sira »
Si mon ou ma futur(e) présidentiable voire mon ou ma futur(e) Président(e) pouvait s’inspirer de ces principes et intimer à ses futurs ministres et administrateurs régionaux de s’en approprier entièrement, nous (société civile) serons infatigablement debout pour reconstruire avec eux et avec plus de fierté encore, le Mali que nous voulons plus beau, plus prospère, plus grand et respecté partout comme aux premières années de notre indépendance.
Cette grande et noble ambition patriotique est réalisable, d’autant plus que nous avons, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, des ouvriers qualifiés, des techniciens, des cadres, des experts voire des savants nationaux aussi bien patriotes, ambitieux que compétents, qu’il faut pour cela. Pour que ceux-ci soient mobilisés autour de cet idéal, il nous faut un Président ou une Présidente bâtisseur(euse) et intègre, rassembleur(e) et chef d’équipe ou d’orchestre éclairé et responsable qui n’hésitera pas à écarter ceux de son équipe qui se plairont à donner une fausse note ou qui feront semblant de travailler.
Mon ou ma futur(e) candidat(e) à la Présidence sera celui ou celle qui comprendra et conceptualisera ce que veut dire « Mali Koura Gnè Ta Sira » ; c’est celui ou celle qui peut être capable d’apporter les changements réels et profonds auxquels aspirent ses compatriotes, parce qu’il les aura rencontrés, bien écoutés, bien entendu et bien compris. Dans cette optique-là, le faux ou la fausse candidate sera celui ou celle qui fera des promesses sans lendemain, c’est-à-dire faites pour plaire et pour séduire, mais qui ne se réfèrera à aucune étude chiffrée ou recherche de terrain et donc à aucune connaissance réelle et approfondie ni des frustrations ni des besoins prioritaires des populations.
Mon ou ma futur(e) candidat(e) à la Présidence sera celui ou celle qui acceptera de débattre contradictoirement dans les médias, avec d’autres candidats ou candidates, projet de société contre projet de société, programme de mise en œuvre contre programme de mise en œuvre. Pourquoi, au cours de tels débats démocratiques à venir et à institutionnaliser, il ne serait pas possible de demander aux futurs compétiteurs-débatteurs, d’entonner individuellement un des couplets de l’hymne national et de donner quelques indications générales sur la composition éventuelle de leurs gouvernements en projet ainsi que sur les profils des « ministrables » (moitié technocrates venus de la société civile, moitié provenant de la classe politique plus inventive et créative, prise en compte de la parité par exemple) ?
« Chat échaudé a toujours peur l’eau froide »
La connaissance par les citoyens, de ces indications sur les profils et sur la manière de construire un tel attelage gouvernemental au nom de l’union sacrée, donneraient, me semble – t-il, plus de confiance et d’espoir aux électeurs et aux électrices pour choisir en connaissance de cause, un Président ou une Présidente rassembleur(euse) qui s’engagerait ce faisant, à travailler avec une équipe gouvernementale resserrée, bâtie non sur une base uniquement partisane ou politicienne de « partage du gâteau électoral », mais sur des critères de patriotisme, de compétence, d’intégrité et de recevabilité.
C’est un risque que devraient prendre les futurs(es) candidats et candidates à l’élection présidentielle, car ils nous permettraient de voter davantage pour une équipe à laquelle nous aurons placé notre confiance que pour une personne, aussi éminente soit-elle, sachant que « le chat échaudé a toujours peur l’eau froide ». En effet le principe de précaution et le postulat qui sous-tendent ce risque en transparence qu’il faudra désormais prendre afin de reconquérir l’estime et la confiance des maliens et des maliennes, sont qu’on peut être déçu plus rapidement par un Président en tant que personne seule à la manœuvre, que par toute une équipe dont on aurait participé indirectement à la pré-nomination.
Le gouvernement préconfiguré de cette façon « en filigrane », peut avoir une fonction pédagogique efficace et peut être un facteur psychologique d’adhésion et de mobilisation plus puissant que les slogans de campagne écrits et diffusés en Français ; contenus de campagne par ailleurs peu accessible aux citoyens, majoritairement illettrée en cette langue. C’est ici que le recours à l’une des deux langues nationales parlées par le ou la candidat(e) vaudra tout son pesant d’or. Ce seraient là une nouveauté et une originalité au Mali, qui ne manquent pas d’avantages dont il faudra toutefois savoir faire un intelligent usage. À propos de tels aménagements, quelle belle opportunité serait la période de transition, si ensemble, nous pouvions y penser lors de la relecture de la charte des partis politiques et celle des autres textes relatifs aux élections ! Et si c’est par un régime parlementaire qu’il faudra passer, pourquoi ne pas y aller dans le cadre de la refondation tant demandée ?
Pourquoi ce texte ?
Pour clore mes propos sur les critères de choix de mon ou de ma candidat(e) voire de mon ou de ma futur(e) Président(e), il convient de rappeler que ce texte vient après ceux que j’ai écrits pour : 1°) définir le « Mali Koura », en tant que membre de la société civile (15 juillet et 6 août 2020), à travers les changements et attentes en termes de réformes à faire et des valeurs d’éthique à y cultiver ; 2°) et pour proposer des pistes concernant la révision de la constitution de 1992 (avril à septembre 2019).
En un mot, ces écrits étaient des contributions d’un malien ordinaire, faites à partir de son constat global que la crise malienne est multidimensionnelle et complexe, et à partir aussi des analyses y relatives qui l’ont conduit à la conclusion que les Maliennes et les Maliens ont impérieusement besoin d’un nouveau Contrat de gouvernance politique, administrative, économique et d’un système éducatif entièrement revu et refondé. C’est pourquoi je considère le présent texte comme la suite de ces écrits antérieurs et comme une contribution d’orientation nécessaire pour un travail de qualité des membres du Conseil National de Transition (CNT) et pour des échanges ultérieurs avec les futurs candidats et candidates pour la Présidence de la République.
Vive la démocratie inclusive et participative afin que toute la société civile puisse être entendue.
Bamako, le 20 mars 2021
Boureima Sory GUINDO, Pionnier d’Honneur du Mali. Président-Coordinateur de l’Association pour le Développement des Compétences Professionnelles (ADCP/PERFORMANCE). Récépissé n° 0908/G-DB en date du 07 novembre 2016 Mail : ambadome48@gmail.com
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